mardi 26 mai 2009

Ma Grand Mère un jour a dit …

Elle s’asseyait sur le balcon de pierre dans un fauteuil en osier recouvert d’un tissu fleuri rouge , derrière un rosier grimpant qui l’abritait des regards .  Je me posais à côté d’elle sur le seuil de la porte , elle m’apprenait à tricoter , à crocheter en héritage .

Je passais ainsi les vacances avec ma Grand-Mère , dans la maison à la campagne . Mes parents nous rejoignaient le week end , la semaine ils m’envoyaient des cartes postales avec toutes sortes de recommandations , sois sage avec ta grand mère , sois une fille raisonnable et obéissante , mange bien , ne fais  pas de bêtise ni de caprice . Il y avait Marie la voisine qui m’emmenait dans les champs , nourrir les lapins , jouer avec Rachel la chienne blanche enfin plutôt grise de saleté . J’étais un rien garçon manqué ( étonnante quand même cette expression ) , exigeante comme une enfant gâtée , quelque peu rebelle à l’image qu’on attendait de moi .

Et puis un jour , ma Grand- Mère  dit à ma Mère :

“ Avec cette enfant , vous vous en verrez toute votre vie ! “

Je ne sais pas pourquoi ma Grand-Mère avait ainsi scellé mon sort , mais lors de crises ou de repas de famille régulièrement cette prophétie revenait , elle fut un refrain de mon enfance , de mon adolescence et me poursuit dans ma vie d’adulte .

J’étais marquée , tatouée , j’étais la vilaine , la mauvaise , c’était décidé !

Il y a des phrases comme ça ,  jetées au hasard d’un trop plein , d’un coup de colère  qui détermine une trajectoire et puis on a beau essayé de s’en débarrasser comme d’une vieille pelure , il semble qu’on s’englue dans ces mots .  Et il faut exister avec cette image , ne pas comprendre quand on fait quelques choses de bien et prendre comme évidence quand on vous dit que ce n’est pas bien , là on retrouve ses repères , les balises du sort scellé , de la prophétie lancée .

C’est un combat permanent , parfois il y a des répits pour mieux se préparer aux assauts suivants , il y a des rencontres rassurantes qui nous font exister différemment et puis il y a cette peur omniprésente d’être dévoilé dans ce elle qu’on vous a imposé , et cette difficulté à pouvoir faire surgir ce moi tout autre .

1 commentaire:

Pivoine a dit…

Et qu'est-ce qu'elle a dit d'autre, pendant le reste de votre vie commune, qui dénoterait tout l'amour qu'elle devait sûrement éprouver pour toi ? Je suis sûre que tu trouverais...